La place de l’enfant dans les sociétés occidentales a beaucoup changé, notamment depuis que la mortalité infantile a régressé, dans le deuxième moitié du XXe siècle, et grâce au développement des moyens de contraception. Grâce aussi aux améliorations des conditions de vie acquises à travers les luttes sociales.

Dans le même temps, les concepts éducatifs ont aussi évolué vers des méthodes qui ne se basent plus sur la crainte ou la peur pour obtenir de l’obéissance. Peu à peu, la violence, la menace ou la sévérité brutale ont été abolies. On reconnait à l’enfant des besoins, des droits, des compétences.

Il n’est plus considéré comme la propriété exclusive de ses parents. Son intégrité et son bien-être, lorsqu’ils ne peuvent les garantir, deviennent affaire d’état.

la protection de l'enfant

La bienveillance en général, et envers les enfants en particulier, est un sujet qui me tient particulièrement à cœur et j’y ai consacré une grande partie de ma vie professionnelle. Je reste active et attentive aux avancées dans ce domaine, sur le plan juridique et surtout éducatif. Vous pouvez aussi relire cet article Mon aïeule qui explique sans doute ma motivation profonde pour pratiquer dans ce secteur difficile.

Un état se doit de protéger ses membres les plus vulnérables, c’est la base de la déclaration des droits de l’homme et de nombreuses constitutions nationales et régionales. Les enfants bénéficient d’une charte de droits sous l’égide de l’ONU que beaucoup d’états ont ratifiée, dont la Suisse. http://charte des droits de l’enfant.

Les structures de protection

Il existe plusieurs définitions de la maltraitance, physique, psychique ou par négligence. Et forcément toute une gradation dans la gravité. Il y a les actes et les « non actes », soit la négligence, la carence ou l’ignorance. Il existe les abus (d’autorité ou sexuels), dépister, reconnaître les signes de maltraitance est difficile, c’est un domaine où des évolutions importantes ont été possibles, grâce notamment au travail multidisciplinaire des professionnels. Ces progrès sont remarquables, mais ne résolvent pas la question de fond du que faire et comment….

Sur la base d’une définition de l’OMS, les pays s’organisent pour assurer la protection des enfants et des mineurs :

« tout acte ou non acte pouvant mettre en danger le développement physique et psychique du mineur »

Il ne viendrait plus à l’idée de personne de justifier des actes de maltraitance évidents : coups, sévices etc. même si malheureusement, cela existe encore trop souvent. Les attitudes nocives sont souvent moins flagrantes et donc difficiles à déceler. Lorsqu’elles sont identifiées, diverses interventions sont possibles…. et c’est là que cela devient très délicat : que faire et comment le faire dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

Dans notre région, le service de protection de la jeunesse qui est en charge de cette mission depuis des années, annonce une profonde mutation. A sa direction, nomination d’une spécialiste des droits humains et transformation du service en « direction générale de l’enfance et de la jeunesse ». L’évolution de cette structure est hautement souhaitable, l’intention politique semble être de lui conférer un rôle plus actif au niveau de la prévention, notamment en milieu scolaire et surtout de renforcer la notion d’intérêt supérieur de l’enfant dans les procédures administratives le concernant. Demeurent à mes yeux les questions de fond que je viens d’évoquer que faire et comment….

Mission impossible ?

L’enfant maltraité ne sait pas forcément qu’il l’est, il ne sait pas que c’est « anormal » et légalement interdit. Il est attaché et loyal aux personnes qui s’occupent de lui, surtout ses parents. Dans la majorité des cas : il ne dit rien. cet attachement, cette loyauté compliquent les réponses aux questions fondamentales. Il n’est pas admissible de laisser un enfant dans une situation de maltraitance mais, paradoxalement, l’éloigner de son milieu implique aussi une souffrance pour lui, des changements abrupts, des intervenants multiples et inconnus, un éloignements de ses repères et parfois une succession de placements.

la protection de l'enfant

Prendre soin

Les blessures de l’enfance et de la jeunesse sont longues à guérir et les professionnels qui entourent ces situations douloureuses devraient être très bien et spécifiquement formés, quelle que soit leur fonction : policiers, juges, assistants sociaux, médecins, psychologues, éducateurs, enseignants, chacune et chacun dans son rôle, ils devraient tenir compte de l’avis des uns et des autres et surtout de celui du principal intéressé.

La bonne volonté ne suffit pas. Une excellente formation non plus.

Idéalement, Il faudrait aussi de l’humanité et de l’empathie, sans parler d’ un intérêt pour les développements dans ce domaine. En résumé une posture bienveillante et de la sollicitude, des compétences professionnelles et des qualités personnelles. Tous ces professionnels ont également besoin de soutien et de références et doivent apprendre à travailler sans s’isoler, ce qui ne correspond pas à toutes les cultures professionnelles. Il est encore trop fréquent de rencontrer des intervenants qui pensent détenir LE savoir et donc LA solution, à cause de leur titre, universitaire par exemple, alors que les connaissances académiques ne sont qu’une partie du bagage nécessaire dans ce champ complexe.

Apprendre la bientraitance

Le focus ne doit pas se porter uniquement sur les jeunes bénéficiaires mais également sur leur leur entourage, car dans une immense majorité des cas, l’ignorance, la vulnérabilité sociale, les différences culturelles, le manque de connaissances et l’isolement sont à l’origine de la mauvaise attitude des parents et /ou de la famille. Sans oublier non plus la répétition de l’histoire de leur propre enfance, pour certains parents maltraitants.

On peut donc intervenir ponctuellement dans les situations avérées, mais en tenant compte de l’ensemble de la famille, ceci est indispensable pour reconstruire, si possible, le bien-être de l’enfant ou du jeune. Idéalement, il faudrait surtout intervenir en amont en améliorant les conditions de vie des familles précaires, en introduisant des informations, de la guidance, voire un soutien matériel et du lien social. C’est donc bien davantage qu’une législation et une organisation administrative, c’est un projet politique qu’il faut ancrer, avec les ressources humaines et financières que cela suppose.