Peu inspirée ces dernières semaines, j’avais cependant préparé un article sur le blues automnal, aussi nommé dépression saisonnière, avec quelques idées de stratégies simples et peu contraignantes pour y faire face. Humour et auto dérision, autant essayer de prendre cela à la légère puisqu’il faut y passer de toute façon !

Et puis voilà, en revenant de chez des amis, nous écoutions les infos dans la voiture. Tout d’abord, je n’ai pas très bien compris : une histoire de parent d’élève mécontent à cause d’un professeur, rien de très extra « ordinaire », mon attention s’ évade. Pas longtemps. Quelques mots me parviennent, je me concentre mieux et j’entends « décapité »… Je sors de ma torpeur et me persuade que j’ai mal entendu, impossible que « décapité » puisse être associé à « professeur », impossible que cette info concerne des faits arrivés ici, enfin en France voisine. Je traverse alors une phase de sidération, c’est trop énorme, trop incroyable, je suis médusée.

Pendant plusieurs jours, mes occupations habituelles m’ont parues bien futiles, plus envie d’écrire, légèreté inaccessible…. Comment en est on arrivé là ? Comment ce poison anti démocratique a-t-il pu se répandre si facilement ? Pourquoi des humains s’abaissent-ils au point de voir la pensée différente de la leur comme un crime passible de mort ? Et surtout de quel droit ?

automne blues 2

Le devoir de penser

Depuis, j’ai lu des articles intéressants, dont celui de Pierre Jourde, écrivain et professeur « Aux musulmans, et en particulier aux élèves et parents d’élèves qui désapprouvent les caricatures de Mahomet » dans la tribune libre du http://nouvel observateur, d’autres, nombreux sur les réseaux sociaux. J’ai vu les hommages, les marches blanches, les photos et les bouquets de fleurs. J’ai entendu les discours et pris connaissance des mesures de lutte envisagées par les politiques.

Je me demande aussi ce que va faire mon pays, la Suisse. Ces extrémistes existent ici aussi et ils sont aussi actifs et dangereux qu’ailleurs. Bientôt, nous entrerons dans la période des fêtes, et je ne peux accepter que dans nos écoles (vaudoises) il soit devenu tabou d’ évoquer la raison de Noël ! Je ne suis pas pratiquante, ni profondément religieuse, mais je suis très attachée à la liberté de culte et de PENSÉE qui, soit dit en passant, n’est pas établie dans nos sociétés occidentales depuis la nuit des temps. Faut-il rappeler l’inquisition, les procès pour hérésie, la chasse aux sorcières et les guerres de religions ? Combien de crimes déjà perpétrés au nom d’une divinité qui n’en demande pas tant ?

Cette liberté, dont l’Islam aussi se prévaut aujourd’hui en occident, nous en sommes redevables à tous ceux et celles qui sont morts pour avoir osé penser autrement que la Sainte église catholique romaine et son bras séculier, le pouvoir en place d’alors. Cette liberté est due à ceux et celles qui se sont battus pour le dire, l’écrire et même le dessiner !

Ce long combat, cruel et sanglant mérite le plus grand respect. Il mérite d’être enseigné et doit pouvoir être compris comme un des fondements de nos sociétés. Tous ces morts, sacrifiés sur l’autel des idées « hérétiques » d’alors, méritent notre souvenir reconnaissant et notre loyauté à leur lutte pour cette liberté contre l’obscurantisme.

Une arme puissante : l’éducation

Depuis cette horrible attentat, menaces, boycott et nouveaux crimes à caractère islamistes à Nice. Comment surmonter ? Que faire ? Les effets de manches et les beaux discours ne suffiront pas. Les hommages posthumes non plus. Pauvres gens juste allés dans une église, selon leurs propres choix et croyances. Égorgés comme les agneaux du sacrifice…..

L’éducation comme rempart contre la barbarie et la bêtise. Celle des jeunes et des enfants, bien sûr, mais aussi et prioritairement celle des adultes, des femmes et surtout des mères, l’éducation comme condition pour un titre de séjour, le devoir d’apprendre en échange des aides ou subventions, les cours pour adultes contre les logements subventionnés, etc. Savoir parler la langue de l’endroit où on vit, connaître un peu de son histoire et de ses coutumes, de ses lois. Apprendre aussi peut-être à lire et écrire pour les plus démunis, à compter. Gagner en dignité pour mieux s’estimer.

Autrefois, l’église ne voulait pas de la vulgarisation du savoir dans les couches populaires. Pendant très longtemps, la messe était dite en latin et les gens récitaient les répons sans comprendre ce qu’ils disaient. Lire et écrire était réservé à l’élite (noblesse et surtout clergé) . L’obscurantisme religieux (et politique) a toujours été un moyen de domination. Si nous ne pouvons que difficilement le combattre ailleurs, nous devons fermement nous y opposer ici. Le savoir permet la réflexion et ainsi de remettre en question certaines idées reçues, puis l’autonomisation.

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semons des graines de connaissance